Arrêts de travail : la vague des longues maladies post-Covid submerge les entreprises
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Depuis la pandémie de Covid-19, les entreprises françaises font face à une progression inédite des arrêts de travail, en particulier de longue durée. Au cœur de cette dynamique, la santé mentale des salariés s’impose comme un enjeu économique et organisationnel majeur, bouleversant la gestion des ressources humaines et la soutenabilité des modèles assurantiels.

Une dynamique structurelle et durable

Les chiffres sont sans appel : la France a enregistré en 2023 plus de 286 millions de journées indemnisées pour arrêts maladie hors Covid, soit une hausse de 41 % par rapport à 2019. Cette inflation ne relève plus de la seule conjoncture pandémique mais s’inscrit dans une tendance structurelle. La durée moyenne des arrêts s’est allongée, passant de 18,5 jours en 2022 à 21,5 jours en 2024. Les arrêts de longue durée, en particulier, explosent : +32 % pour raisons psychologiques en un an, faisant des troubles mentaux la première cause d’absence prolongée devant les troubles musculo-squelettiques.

La santé mentale, nouveau front de l’absentéisme

Cette évolution s’explique en grande partie par la dégradation rapide de la santé mentale des salariés. En 2025, un quart des actifs se déclarent en mauvaise santé psychique, un taux jamais atteint depuis le début des mesures. Les arrêts longs sont désormais majoritairement motivés par des troubles anxio-dépressifs, des burn-out ou des syndromes d’épuisement professionnel. Les secteurs médico-sociaux et les jeunes actifs sont particulièrement touchés, mais la progression s’observe dans toutes les catégories professionnelles, y compris chez les cadres, où l’absentéisme a bondi de 41 % depuis 2019.

Parmi les facteurs aggravants, la persistance d’incertitudes économiques, la charge mentale accrue par la digitalisation et la porosité entre vie professionnelle et personnelle jouent un rôle clé. Les jeunes salariés, plus enclins à privilégier leur santé, affichent une hausse spectaculaire des arrêts pour burn-out (+66 % chez les moins de 30 ans).

" Les générations les plus jeunes n’hésitent plus à privilégier leur santé face à des organisations de travail perçues comme délétères », souligne la professeure Sophie Fantoni-Quinton, présidente de la Société française de santé au travail."

Un coût économique et social croissant

L’impact financier pour les entreprises et la collectivité est considérable. Les indemnités journalières versées ont atteint 10,2 milliards d’euros en 2023, en hausse de 30 % sur dix ans. Cette dérive des coûts met sous pression les régimes d’assurance et interroge la soutenabilité du système, alors même que les entreprises doivent composer avec des équipes fragilisées et des difficultés croissantes de remplacement.

Vers une transformation des politiques RH

Face à cette lame de fond, les entreprises n’ont d’autre choix que d’engager une transformation profonde de leur management. La détection précoce des signaux faibles, la formation des encadrants aux risques psychosociaux et l’aménagement des organisations deviennent des priorités stratégiques. Les employeurs les plus innovants investissent dans des outils prédictifs croisant absentéisme, climat social et indicateurs de bien-être, tandis que la prévention primaire s’impose comme un levier de compétitivité.