À l’ère du tout-numérique, nos activités en ligne – emails, streaming, stockage de données, ou encore utilisation d’objets connectés – génèrent une pollution invisible mais bien réelle. La pollution numérique, responsable d’environ 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, croît deux fois plus vite que la moyenne des autres sources d’émissions. Pourtant, contrairement aux déchets plastiques ou aux fumées industrielles, ses impacts restent méconnus du grand public peu sensibilisé aux conséquences environnementales de l’usage du numérique.
Agir contre la pollution numérique, un enjeu invisible mais urgent
Cette pollution se manifeste à plusieurs niveaux : consommation énergétique des data centers, extraction minière pour les composants électroniques, ou encore obsolescence programmée des appareils. Face à ce constat, des solutions existent, à la fois individuelles et collectives. Comment concilier innovation technologique et préservation de la planète ? Quels gestes concrets adopter au quotidien ? Autant de questions qui méritent d’être explorées pour construire un avenir numérique plus responsable.
Qu’est-ce que la pollution numérique ?
La pollution numérique aussi appelée e-pollution désigne l’impact environnemental, social et économique généré par les technologies numériques, tout au long de leur cycle de vie. Elle englobe plusieurs dimensions :
Un impact environnemental avec notamment :
Les émissions de CO₂ : les data centers, les réseaux (4G/5G, Wi-Fi) et les appareils (smartphones, ordinateurs) consomment une énergie massive, souvent issue d’énergies fossiles. Par exemple, l’envoi d’un mail avec une pièce jointe de 1 Mo émet environ 19 g de CO₂ (source ADEME).
La consommation de ressources avec l’extraction de métaux rares (cobalt, lithium, terres rares) pour les appareils, souvent dans des conditions sociales et environnementales critiques.
La création de nombreux déchets électroniques dont seulement 20 % sont recyclés dans le monde (source ONU, 2024). Le reste est parfois exporté vers des pays en développement, est mal recyclé ou simplement stocké et pollue les sols et les nappes phréatiques.
Une pollution invisible avec des chiffres qui parlent d’eux même :
Le stockage des données : les data centers (comme ceux de Google, Amazon ou Facebook) consomment 3 à 5 % de l’électricité mondiale.
Le streaming (le fait de regarder la télévision ou d’écouter des podcasts sur des appareils connectés à Internet) et les vidéos sur les plateformes : 1 heure de vidéo en Haute Définition consomment 300 g de CO₂ (l’équivalent d’un trajet de 1 km en voiture).
Les publicités en ligne : les bannières et vidéos publicitaires représentent 10 % du trafic internet et génèrent des émissions inutiles.
Une pollution cognitive et sociale insoupçonnée :
La surcharge informationnelle avec les mails, notifications, ou les réseaux sociaux créent du stress, réduisent la concentration et nuisent à la productivité.
Une addiction aux écrans avec un impact sur la santé mentale (anxiété, troubles du sommeil) et les relations sociales.
Une pollution économique avec :
Des coûts cachés. En effet, le numérique représente 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (plus que le transport aérien), avec une croissance annuelle de 6 %.
Le gaspillage dû à l’obsolescence programmée des appareils.
En résumé, la pollution numérique touche à la fois l’environnement, l’humain et l’économie et doit donc être prise en compte avec la mise en œuvre de solutions à la fois au niveau des particuliers et des entreprises.
Et il est aujourd’hui urgent d’agir ! En effet, le trafic internet mondial a été multiplié par 10 en 10 ans et devrait encore doubler d’ici 2030 (Source Cisco) ! Par ailleurs, les ressources naturelles comme les fameuses terres rares essentielles à la fabrication de nombreux appareils électroniques, risquent de devenir inaccessibles et un facteur de tensions géopolitiques.
Comment réduire son empreinte numérique ?
De nombreuses actions peuvent être mises en place à la fois au niveau individuel mais aussi au niveau des entreprises et des institutions.
À l’échelle individuelle, chacun peut agir au quotidien pour réduire son empreinte numérique :
En optimisant son usage du numérique. Cela peut passer par exemple par :
La limitation de l’envoi d’emails inutiles comme des blagues, entre collègues ou membres de la même famille réunis dans un même lieu.
Le stockage local sur un disque dur externe, par exemple, plutôt que le cloud pour les fichiers peu utilisés.
Le « nettoyage » régulier de sa boîte mail et de ses espaces de stockage en ligne.
En allongeant la durée de vie des appareils :
On fait réparer plutôt que remplacer.
On achète des appareils reconditionnés ou d’occasion. Il existe de nombreux sites qui vous proposent des téléphones, des ordinateurs, reconditionnés à des prix inférieurs aux neufs avec des possibilités de souscrire des garanties.
Éteignez les appareils plutôt que de les laisser en veille quand vous ne les utilisez pas. Même si cela vous demande l’effort de vous lever pour les éteindre et de patienter lors de leur remise en route…
En adoptant une consommation responsable :
Privilégier les marques engagées dans une démarche éco-responsable (recyclage, économie circulaire).
Limiter le nombre d’objets connectés (enceintes, montres, etc.).
Recycler ses déchets électroniques.
Si l’ensemble de ces comportements individuels peut contribuer à réduire la facture environnementale du numérique, les entreprises et les institutionnels mais aussi les écoles et les médias ont leur rôle à jouer.
Pour les entreprises, il peut s’agir :
D’adopter des data centers (centres de stockage de données) alimentés par des énergies renouvelables, comme le proposent aujourd’hui Google ou Apple, qui visent la neutralité carbone.
D’optimiser leurs infrastructures informatiques pour réduire leur consommation énergétique.
De sensibiliser les employés à la sobriété numérique (formation, charte d’usage).
Pour les institutionnels, il est important :
De renforcer les réglementations sur le recyclage des déchets électroniques et l’éco-conception des appareils.
D’encourager la recherche et développement de technologies moins polluantes (ex : processeurs basse consommation).
De soutenir les filières de réparation et de reconditionnement.
Les écoles et les médias doivent :
Intégrer l’éducation au numérique responsable dans les programmes scolaires en faisant prendre conscience aux enfants que leur consommation de réseaux sociaux, de vidéos n’est pas sans impact sur l’environnement. Trop peu d’entre eux en sont conscients aujourd’hui encore.
Relayer des campagnes de sensibilisation sur les impacts du numérique pour informer sur les impacts environnementaux de notre consommation numérique.
Mais ces mesures, bien que nécessaires, ne sont pas suffisantes car la consommation numérique ne fait que croître. Il faut donc dès à présent imaginer des solutions, des innovations technologiques qui vont permettre de limiter l’impact environnemental du numérique.
Parmi ces innovations, on peut citer :
Le green IT : il s’agit du développement de logiciels et de matériels moins énergivores (ex : navigateurs web légers comme Brave ou Ecosia) mais aussi de toutes les pratiques mises en place par l’entreprise pour réduire l’empreinte écologique et sociétale liée à l’utilisation des nouvelles technologies de l’information...
L’informatique quantique : à long terme, elle pourrait réduire la consommation énergétique des calculs complexes. Mais ne me demandez pas de vous expliquer pourquoi ! 😉
Les énergies renouvelables : certains data centers sont désormais refroidis à l’eau de mer ou alimentés par des parcs solaires.
La pollution numérique est un défi invisible mais urgent, qui nécessite une prise de conscience collective et des actions coordonnées. À l’heure où le numérique est omniprésent, il est essentiel de repenser notre rapport à la technologie pour concilier innovation et respect de l’environnement. Chaque geste compte, et c’est en agissant à tous les niveaux – individuel, professionnel et politique – que nous pourrons construire un avenir numérique durable.
Les impacts de nos comportements numériques. Quelques exemples :
Éteindre les appareils inutiles : un ordinateur en veille consomme jusqu’à 40% de sa consommation normale. Une extinction complète des appareils électroniques la nuit permet d’économiser jusqu’à 100kWh par an.
Nettoyer sa boite mail : une boite mail moyenne émet 10kg de CO2 par an. La nettoyer permet de réduire cet impact.
Privilégier le streaming responsable : regarder une vidéo en HD émet 300 fois plus de CO2 qu’en définition standard.
Limiter le stockage dans le cloud : le cloud représente 10% de la consommation électrique mondiale !
Recycler ses déchets électroniques : En France 1 Français sur 2 garde des appareils inutilisés dans ses tiroirs alors que des points de collecte comme Eco-Systèmes permettent de les recycler correctement. Vous pouvez trouver les différents points de collecte sur www.ecosystem.eco.
Éviter les envois de mails inutiles : une entreprise de 100 personnes peut économiser 1 tonnes de CO2 par an en réduisant les envois de mails internes (Source ADEME)
Avec la généralisation du télétravail, des objets connectés et de l’IA, la pollution numérique explose. En France, le numérique représente 10 % de la consommation électrique nationale (ADEME, 2025).
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